Raymond Roussel

Nouvelles impressions d’Afrique

1932

Raymond Roussel’s New Impressions of Africa is a book-length poem from 1932 in four sections. Roussel’s poem is constructed in a highly idiosyncratic way: he repeatedly introduces digressions with parentheses, sometimes nested five deep, and also introduces digressions using footnotes. (Longer explanations can be found here and here; an introduction to the latest translation can be found here.) Roussel’s rhymes and meter scan properly whether or not the digressions are taken into account.

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I

Damiette

la maison ou saint louis fut prisonnier

Sans doute à réfléchir, à compter cela porte,
D’être avisé que là, derrière cette porte,
Fut trois mois prisonnier le roi saint ! . . . Louis neuf ! . . ,
Combien le fait, pourtant, paraît tangible et neuf
En ce pays jonché de croulantes merveilles,
Telles qu’on n’en sait point ici bas de plus vieilles !
Elles présentes, tout semble dater d’hier :
Le nom dont, écrasé, le porteur est si fier
Que de mémoire, à fond, il sait sans une faute
(Comme sait l’occupant, dans une maison haute,
D’un clair logis donnant sur le dernier palier
– Photographe quelconque habile à pallier
Pattes d’oie et boutons par de fins stratagèmes –
((Pouvoir du retoucheur ! lorsque arborant ses gemmes
(((Chacun, quand de son moi, dont il est entiché,
Rigide, il fait tirer un orgueilleux cliché,
– Se demandant, pour peu qu’en respirant il bouge,
Si sur la gélatine, à la lumière rouge,
Dans le révélateur il apparaîtra flou, – 
((((Tels se demandent : – S’il diffère d’un filou,
Le fat qui d’un regard (((((parfois une étincelle,
L’entourant de pompiers qui grimpent à l’échelle,
Fait d’un paisible immeuble un cratère qui bout ;
Que n’a-t-on, lorsqu’il faut d’un feu venir à bout,
Un géant bon coureur, – quand une maison flambe,
Un sauveteur loyal do-it-il, traînant la jambe,
Considérer de loin la besogne en boudeur ? –
Qui, prêt, tel Gulliver, à vaincre sa pudeur,
Aurait à satisfaire une envie opportune.
)))))
Enflamma, dépourvu, lui, de toute fortune,
Une catin de marque ayant voilure, hôtel,
Qu’il vient, le rouge au front, de conduire à l’autel ;
– A Nice, l’arrivant, l’œil sur le thermomètre,
Si, défiant le rhume, en toile il va se mettre ;
À l’hiverneur niçois donner un pardessus
(Prêt qu’il est à jurer – les jours même où, pansus,
De durs magots de neige y pouffent d’un air nice –
Qu’en janvier, de bon cœur, on irait nu dans Nice,
Toi Archimède aux cent coups criant : « Eurêka »),
C’est donner : – au novice, en mer, de l’ipéca,
Tandis qu’a la briser l’ouragan tend l’écoute ;
Quand un conférencier prélude, a qui l’écoute,
Un narcotique ; – à qui hors d’un train bon marcheur
Se penche, un éventail ; – lorsqu’il rentre, au pécheur
Ayant communié t ard, de la noix vomique ;
– Un nez postiche au juif, moins que le sien comique ;
– Pendant l’ivresse, avant le serrement complet,
Un aphrodisiaque au pendu ; – le soufflet
A qui s’escrime contre un feu de cheminée
Réfractaire ; – à qui sort d’un livre, auguste aînée,
Une idyllique fleur sèche, un aplat issoir ;
– à qui, sagace, en paix laisse une aragne un soir,
S’assurant une passe heureuse, un porte-chance ;
Lorsque en gants de peau vers l’eau bénite elle avance
Son médius rebelle, à la dévote, un truc
Pour ne rien gaspiller ; – quand l’express, truck par truck,
Brûle en route un marchand train, à qui voit leur lutte,
Un pronostic ; – le soir venu, quand, dans sa hutte,
Pour son somme il s’apprête, au noir, des bigoudis ;
– Quand, martelant le sol, dans ses doigts engourdis
Souffle un mal inspiré dyspept ique, une boule
Puante à qui de près lui parle ; – un jour sans houle,
De l’avance au vapeur qu’oseur brave un voilier ;
– Au piéton qu’un sellé cheval sans cavalier
Dépasse, un coup double à demi-tour sur l’échine ;
– A l’ouvrière, en juin, qui, cousant sans machine,
Se tette une phalange, une rose à tenir ;
– A rebours, lorsqu’il gronde avant d’intervenir,
Un coup de brosse au chien sur l’épine dorsale ;
– Quand chez lui tout s’attaque, au maigre à langue sale
Qu’on va perdre, une forme à forcer les chapeaux ;
– Au reclus, quand dehors claquent dur les drapeaux,
Sur la flûte, ondulant, maint chromat ique exemple ;
– Quand naît l’orage, à qui, dominé, le contemple
Et l’oit, pour moins que la lumière ailé le son ;
– Au souffleur, quand t ire à sa fin une chanson,
Lors du refrain un coup d’épaule à chaque ligne ;
– Un sursis au coq qui, l’automne enfui, trépigne
Quand tarde une aube ; – au Juif errant, un rond de cuir.
– Resté seul, Horace, à quelle vitesse fuir ;
– Le lièvre si lorsqu’il musait par la bruyère
L’eût distancé même un vieux morceau de gruyère ;
– Si valsent ou non les bouteilles de Clicquot
Le soupeur dont le nez tourne au coquelicot ;
– L’Yankee si, pour de bon, plus lisse est qu’une orange
La terre, alors qu’il grimpe à l’Alleghanys Range ;
– L’étranger si plus rien n’est en vice amoral
Dans « vice président » ou dans « vice amiral » ;
– Si, méthodique, avant de l’arroser, Cerbère
Le flairerait de ses trois nez, le réverbère ;
– L’hiver, sur le trottoir, maudissant son bourreau,
S’il rentrera sans rhume, un riflard sans fourreau ;
– Quand, poisseuse, elle a l’heur de puer, la semelle,
Si de son sort chanceux jalouse est sa jumelle ;
– La fermière, à l’aube, en passant son caraco,
De quel coq debout la mit le cocorico ;
– Quand, sonore, entre en danse un conscrit, sa chemise,
Quelle purge, au réveil, dans la lampe il s’est mise ;
– L’enfant qui de travers pousse dans le bassin,
S’il sera de sa mère, en naissant, l’assassin ;
– La fleur, si son parfum renaîtra, qu’on asperge,
Sous un arbre écarté, d’un jet qui sent l’asperge ;
– Lorsque à l’église un juif cherche un coin dans la nef,
Pourquoi chez Dieu bas on l’a mis, son couvre chef ;
– Le journal, qui le plus sur son revers pullule,
Du dentifrice, du prêt ou de la pilule ;
– Réfléchissant sur son passé, si pour jeunot
Il passe, ou pour vieillot, le couteau de Janot ;
– Le mur, quelle faute en conscience est la sienne,
Qu’exalté jouet du vent bat la persienne ;
– L’archet, lorsque avant qu’il serve on retend son crin,
S’il faudra longtemps pour accorder le crincrin ;
– Le thermomètre ailleurs placé que sous l’aisselle,
Si loin du but encore est la prochaine selle ;
– S’il sera d’une douche honoré, le genou
Qu’en dada sédentaire a changé la nounou ;
– Le procédé frappeur, pourquoi, fière, la bille
Point ne fraye avec lui, qui de rouge s’habille ;
– Quel satisfait vient d’en sortir, celui qui sent
Une odeur connue au seuil du numéro cent ;
– Le collignon à fouet rageur, à quelle cote,
Dans le Grand Prix, gagnante, on donnerait Cocote ;
– Si monter pratiqué en homme, à la longue, en arc,
Par degrés lui mettra les jambes, Jeanne d’Arc ;
– Le sans le sou, s’il est près de rouler carrosse,
Qui, malin, d’un bossu vient de toucher la bosse ;
– Quand sous sa dextre on penche un sac de confiseur,
Si des vers vont doubler son plaisir, le liseur ;
– L’astronome âgé, si, gâteux, avec un signe
Du Zodiaque, un jour, il confondra le Cygne ;
– Les vieux, si saint Martin, vraiment, par son été,
Rend possible un instant d’être et d’avoir été ;
– L’architecte, si lorsqu’il porte, pas plus grosse
Qu’un jouet, sa maquette, on le prend pour un gosse ;
– Le théologien, si la Vierge à son fils
Doit sa célébrité plus ou moins qu’à ses fils ;
– Le dompteur, si sa veuve, un an, sans gris ni mauve,
Stricte s’habillera, dont se régale un fauve ;
– Si ses enfants naîtront sourds, celle dont la main
Fut la veille accordée à son cousin germain ;
– Le loustic, si, pour voir où son cordonnier perche,
Mieux vaut dans sa bottine ou son Bottin qu’on cherche ;
– Le lait chaud par l’attente attiédi dans son pot,
S’il choira dans la tasse avec ou sans sa peau ;
– S’il risque, osé, qu’à grains d’ellébore on le purge
D’autorité, l’ultra moderne dramaturge ;
– Le poète, si l’on pourrait avec « Auteuil »
Faire à souhait rimer « comme dans un fauteuil » ;
– Le peintre méconnu, si, du haut des étoiles,
Mort, il verra les snobs se disputer ses toiles ;
– L’explorateur, si, loin de ce qu’il a de cher,
Un jour il repaîtra son prochain de sa chair ;
– Si va lui sembler fort son enfant, l’accouchée
Qui ne s’est, avec lui, pas encore abouchée ;
– Le jeune auteur, la gloire a l’horreur du teint frais.
Jusqu’à quand ses écrits paraîtront à ses frais ;
Pour que d’un travailleur les oeuvres soient illustres,
Il faut que sur sa tête aient passé force lustres ;
Seul le chêne est prospère, envahissant, ombreux,
Dont le tronc est strié de ronds déjà nombreux.
– L’enfant, si, quand de l’ogre il mit les grosses bottes,
Poucet souffla dessus pour les rendre nabotes ;
– Le vieillard qui parcourt une lettre de part,
S’il sera bientôt mûr, lui, pour le grand départ ;
– Le Président, quels points il rend à la solive
Alors qu’il signe ou gâche en discours sa salive ;
– L’ouvrier qui se sait un clou dans l’estomac,
S’il le retrouvera demain dans son thomas ;
– Le convive en retard risquant l’excuse louche,
Si l’on va rapporter la soupière et la louche ;
– A quel prix bout par bout sera par lui vendu
L’homicide licol, l’héritier d’un pendu ;
– La poule, comment, l’œuf qu’elle venait de pondre,
Avec l’œuf d’une cane elle a pu le confondre ;
– L’ignorant qui voit fuir vers le large un bateau
Pour qui n’a rien appris la terre est un plateau.
Dont seul émerge encore un fragment de mâture,
Si des squales déjà son monde est la pâture ;
– De qui sont ses marmots, la fille dont le lit,
Tant elle a de savoir, jamais ne désemplit ;
– L’amateur de morphine, à quel rang épicure,
En classant les plaisirs, eût placé la piqûre ;
– L’alpiniste en extase au bord d’une hauteur,
Comment de l’univers louer assez l’auteur ;
– L’oiseau, quand (((((le soleil échauffant jusqu’au marbre)))))
En juillet on déjeune à l’ombre sous son arbre,
Dans quelle assiette il va, loin de se retenir,
Laisser choir en visant, tout frais, un souvenir ;
– Pendant qu’il met la lune à son point, l’astronome,
S’il y va voir marcher, la tête en bas, un homme,
Telle une mouche errant au plafond à pas lents ;
)))),
Prétend déterminer son rang ou ses talents ;
Pour que déféremment avec lui l’on s’exprime,
Le ferrailleur taré pose en veste d’escrime,
Comme prêt à fixer un chacun de travers ;
Plume aux doigts, l’œil vers Dieu, le ciseleur de vers,
Qui – sans cesse y cherchant la plus millionnaire –
Des rimes sait par cœur tout le dictionnaire ;
La richarde, le buste orné d’un cabochon
Digne d’une carafe en quête d’un bouchon ;
En surtout d’Esquimau, le revenant du pôle,
Dont les mensonges sont à l’abri du contrôle ;
Son violon au cou, le joueur éminent
Que dispute à l’ancien le nouveau continent ;
Face à son chevalet, l’émule altier d’Apelle
Dont rayonne le nom, centre d’une chapelle ;
Raquette au poing, sans veste, en blanc frais, sans gilet,
Le roi du tennis qui se moque du filet ;
Tout équipé, l’oisif épris de vénerie,
Lançant, martiale, en selle une sonnerie ;
L’argumenteur de marque, en robe, qu’au barreau
L’on jalouse, tant il fait chômer le bourreau ;
L’arrivé pianiste au clavier, chez qui, même,
énergique et propre au trille est le quatrième ;
Tel qu’excentrique, avec l’accent d’un fils de John
Bull, sur la piste il parle à l’écuyer, le clown ;
Le grand musicien, comme lorsqu’il compose,
Traçant tel final point d’orgue sur une pause ;
Sec sous sa casaque ample à clairsemés gros pois,
Le jockey pour qui cent livres sont un gros poids ;
)))
Se fait prendre en famille une beauté qui, mûre,
N’entend plus sur ses pas monter aucun murmure,
De mère, sur la plaque, elle se change en sœur ;
))
L’avis roulant sur l’art de mouvoir l’ascenseur ;
)
– Racines, troncs, rameaux, branches collatérales –
L’état de ses aïeux ; les frustes cathédrales ;
Voire le fier menhir, l’original cromlech,
Le dolmen sous lequel le sol est toujours sec.

II

Le Champ de bataille des Pyramides

Rien que de l’évoquer sur ce champ de bataille,
A l’âge où le surtout – le long surtout à taille –
Et le petit chapeau – desquels nous extrayons
Quel que soit notre bord d’intimidants rayons –
(Extraire à tout propos est naturel à l’homme ;
Il extrait : de ce rien, la chute d’une pomme,
Une loi qui le voue à l’immortalité ;
D’une fable ou d’un conte une moralité ;
Du grêle épouvantail, simple croix qui se dresse
– Sa tenue accusant la plus noire détresse –
((Que d’aspects prend la croix ! un groupement astral
Forme celle du sud au cœur du ciel austral ;
Figurément parlant, tous nous portons la nôtre ;
Quand un juste succès remporté par un autre
Eut l’approbation d’un de ces envieux
Qui, sourdement rageurs, sans percer se font vieux,
– Cerveaux poussifs privés de toute flamme innée, –
Ses familiers en font une à la cheminée ;
Sans faute, une fois l’an, – parti le carnaval, –
(((Pour peu qu’il soit du moins sur le rite à cheval
Et, croyant à l’enfer, redoute d’y descendre
)))
Le chrétien, sur le front, s’en fait mettre une en cendre ;
Quand délibérément (((s’approcher d’un repas
Est un ravigotant sans rival pour le pas ;
Quand vers le râtelier un équipage cingle,
Les chevaux fendent l’air sans que le fouet les cingle,
Tels des pur-sang issus d’illustres étalons ;
)))
On gagne un restaurant, – à l’heure où les talons
De tout bon estomac sont la place attitrée, –
Souvent, près d’un rôti, par la porte vitrée,
Si l’homme, pour bâtir, n’usait que de cristal
(Tel l’ intermède ami qui coupe un récital,
Une note distrait, donne un peu d’insomnie
),
Il frapperait à mort plus d’une calomnie
(Et le soleil, enfin, éclairerait les cours !) ;
Combien cont inueraient, toutefois, d’avoir cours !
Colle entre autres, hélas ! qui consista à prétendre
(Bien que, sans contredit, même en son âge tendre,
La vieille humanité n’ait jamais vu son dos
)
Que la lune (ce monde où règne le repos,
Où nul zéphyr ne souffle, où nul volcan ne jongle,
Monde dont nous portons à la base de l’ongle
– Sans soupçonner à quoi, tel qu’il est, il nous sert –
((Mais à quoi sert le lac qui nous leurre au désert,
Nous faisant espérer la boisson et la pêche ?
A quoi notre frisson au vu de la dépêche
Dont nous ne déchirons la bande qu’en tremblant ?
))
Un timide portrait réduit mais ressemblant,
Décoratif surtout présenté par le pouce,
Monde récalcitrant où nul germe ne pousse,
Vu qu’il n’a pas en tout, sur lui, ce qu’il faut d’eau
– Là, point de naufragé priant sur son radeau
Ni de pays portant le nom de Finistère –
Pour baptiser, pour peindre ou pour prendre un clystère ;
)
Agit en satellite éminemment poltron.
On voit se mettre en croix (((tandis que le patron
((((Quelque spécialiste en fait de bonne chère,
Qui frémirait de voir un fruit d’espèce chère
Subir l’attouchement d’une lame d’acier
)))),
Sachant que l’homme porte, avisé besacier,
Dans une poche ronde à souhait qu’il croit plate,
Ses personnels défauts derrière l’omoplate
((((Dès que l’homme, au surplus, pour avoir ausculté.
(((((Comme on fait d’un jeune être à qui la Faculté
A défendu l’amour et la fenêtre close
En le trouvant miné par la tuberculose,
Qui, dure aux jouvenceaux, respecte l’âge mûr
)))))
Pendant qu’on l’épluchait telle porte ou tel mur
(((((Gardons-nous d’oublier qu’en effet la voix porte
Au delà d’un mur mince, au delà d’une porte ;
))))),
Voit tout nus ses défauts, ses tics, ses appétits,
Par ses yeux complaisants ils sont rendus petits
(((((Tels : – l’ombre, vers midi, sur le cadran solaire,
Montrant que l’estomac réclame son salaire ;
– Par le gel, le niât-on, le mètre étalon ;
– Défiant la crotte un retroussé pantalon ;
– Un journal sur la planche à trou d’un édicule ;
– La botte à retaper dont le talon s’écule ;
– Ce qu’attentif décoiffe à coups d’ongle un rabbin ;
– Lorsqu’il met le couvert la pile d’un larbin ;
– Mû par un barbier, un dossier de fauteuil tiède ;
– Le mètre, au réveil, qu’un soldat ancien possède ;
– Juliette, au gala d’éjur, et Roméo
Par deux mimes enfants faits gratis pro Deo ;
– Le fer vaincu qu’en scène un preux rompt sur sa cuisse ;
– Le pain qu’en salivant guide à la messe un suisse ;
– L’asperge au rancart mise après le coup de dent ;
– Quand sert la bêche, un ver à mortel accident ;
– La canne à dard demi-nu quand fausse est l’alerte ;
– Le trop haut pupitre à musique fraîche ouverte ;
– Quand pousse un pianiste enfant, son siège à vis ;
– L’âgé calendrier-bloc, corpulent jadis ;
– La suspension qu’on remise après la soupe ;
– La bande de papier postal lorsqu’on se coupe ;
– La tache attristant la glace où l’haleine a pris ;
– Au premier éclair qui compte, la voile à ris ;
– La table après un grand dîner réarrondie ;
– L’arche où monte, agressive, une eau qu’on étudie ;
– Au puant souffle à but du fumeur, l’amadou ;
– La queue à bout neuf en sang du jeune toutoù
– Quand le dressage agit, l’oisif bout de gourmette ;
– Quand sa tête arrive à choir, l’éteinte allumetté
– L’ouvert tube à demi plat qu’enroulé un rapin ;
– Quand, mûr, son bouton part, l’élastique à pépin ;
– Quand le lit prend sa place au berceau, la ruellé
– Le pissenlit qu’exprès l’haleine atteint, cruelle ;
– Ses pointes faites, la ballerine à clinquant ;
– L’acte interprété par maître X... d’un délinquant ;
– Quand l’arroseur cède à la soif, le jet de lance ;
– Le fil qui par l’aragne escaladé balance ;
– Au bord d’un tapis vert un honnête magot ;
– Un cigare réduit à l’état de mégot ;
– Le disque du soleil dans le ciel de Neptune ;
))))),
Comme si, choisissant la seconde opportune,
Un ensorcellement eût su le rendre enclin
A prendre : – l’appareil qui, trouvé par Franklin,
Sans danger dans un puits fait se perdre la foudre
Pour un fil gris passé dans une aiguille à coudre ;
– Pour ceux dont s’orne un bras arrivé d’officier
Au ciel trois jumeaux blancs astres d’artificier ;
– Quand, médian, le coupe un trait, pour la bavette
D’un prêtre ; un tableau noir ; – l’empli tube à cuvette
D’un chaud thermomètre à bientôt peter réduit,
Pour une épingle à chef rond ; – la laisse que suit,
Tiède, un collier veuf du chien qui de près lui touche,
Pour un fil d’ombrelle à cercle ; – une spire à douche
A système accompli, pour un naïf ressort
A boudin ; – l’éteignoir fidèle au cierge mort,
Pour ce qui taille un blanc crayon noir d’ingénue
A carnet de bal ; – la boule aquatique et nue
D’un dentaire effrayant recoin, pour l’abreuvoir
D’un serin sobre ; – pour l’arrière, à son devoir
Soustrait, qu’un flot soulève, un moulin mal à l’aise
Qu’en brutal favorise un ouragan ; – l’anglaise
Clé, de l’écrou gardant mémoire, pour un quart
De soupir ; – pour un œuf au plat seul à l’écart,
Salé ferme à son centre, un baissé crâne à rite
D’âgé prêtre à jaunissé et pour la marguerite
Sans tige où rien n’accuse un revers à tronçon,
L’œuf au plat ; – pour trois traits chics rayant sans façon
D’un glacé gant du soir la blancheur magnifique,
Trois touches noires sœurs ; – un pied photographique,
Quand part le Rayon Vert, pour un jeté restant
De cerise triple ; – en passant, pour l’attristant
Jet d’eau qu’un coude à trou lorsqu’on arrose engendre,
Celui d’un parc ; – pour un hamac à se détendre,
Au cirque, un bissecteur filet de sûreté ;
– La flèche ignare à bail sublunaire écourté
Qu’on sort d’un cœur, pour une instruite plume d’oie
A rouge encre ; – un marin projecteur qui s’octroie
Des droits de balaiement systématique, pour
Un porté falot sourd ; – le jet de lest qu’au jour
Met l’aérostier qui part, pour l’interne chute
D’un sablier ; – pour un rouleau clos qui débute
Comme ex-bobine à neuf ruban, un poussiéreux
Tambour après l’étape ; – un divorcé gant creux
De cardinal, pour la massive main de marque
En corail d’où naît du bonheur ; – dans une barque,
Pour deux spatules à l’usage d’un potard,
La paire d’avirons ; – le nœud dont, tôt ou tard,
D’une fille d’Alsace à ravir le chef s’orne,
Pour un nœud lavallière à cou ; – pour une borne
Près d’un banc, un menhir d’un dolmen peu distant ;
– Un groupe au pas d’agents, pour l’essaim contristant
D’internes sans foyer qu’aux jours de fête on croise ;
– Pour un pauvre O d’aphone éclos sur une ardoise,
Un cercle en un seul coup fait sur un tableau noir ;
– Pour celui dont se coiffe un goulot, l’entonnoir
Avec quoi, d’un café, traçant des huit sans nombre,
On mouille la terrasse ; – aux heures de pénombre,
Sous les tropiques, pour une chauve-souris,
Un vampire ; – la carte où, chassant nos souris,
D’un mort nous dit merci la famille, pour celle
D’un visiteur en deuil frais ; – pour de la ficelle
A sacs de confiseur coté, du cordon d’or
Pour képis d’officier ; – dans certain corridor,
Pour deux chevrons pointe en bas proche un esprit rude,
La marque d’huis du fond ; – pour une pêche où, prude,
Le regard n’ose atteindre, un rouge arrière-train
D’enfant fautif fouetté ; – pour la chaînette à grain
Restant d’un chapelet rompu, la chaîne à boule
D’un forçat du vieux temps ; – pour celle qu’à l’ampoule
L’épingle arrache à point, la fuite qu’au désert
Le fer d’un traître extorque à l’outre ; – quand, disert,
Le vent rage, un radeau maté dans une trombe,
Pour un toton ; – signal rouge, une fiche en rhombe
De fiole à poison, pour un central débris
D’as de carreau ; – pour celle à quoi, de chic épris,
Le myope, en peinant, fait s’unir son orbite,
Une glace à hublot ; – pour l’averse subite
D’un arrosoir à fleurs, ce qui sur le chef pleut
D’une pomme à doucher ; – quand, sans sauve-qui-peut,
A l’épreuve on le met, pour deux baissers de trappe,
Ceux du rideau de fer ; – pour la règle qui frappe,
Quand s’en mêlent les nerfs, des doigts nus d’écolier,
Une poutre à décor funéraire ; – un collier
De pilori, pour des menottes, en spectacle
Ne s’offrant qu’à demi ; – pour ce qui d’un obstacle
Borde un gazon, un plant télégraphique à fil
Solitaire ; – quand jacte en l’air un pitre vil,
Sa grosse caisse, au bord, pour un tambour de basque
Plaqué contre un miroir ; – quand sur eux, sans bourrasque,
Il s’est mis à neiger, des œufs rouges massés,
Pour des fraises qu’on sucre ; – en mai, temps noirs passés,
Une épousée, en plein lieu saint, pour une unique
Communiante ; – pour le faire-part cynique
Qui par clichés procède, un journal noir de bords
A directeur défunt ; – pour ce qu’ivre d’accords,
Sa main rythmant son pas, l’Espagnol fait s’ébattre,
Un claquoir ; – pour l’engin d’un chef qui d’un deux-quatre
Multiplierait les bis, par gros temps un beaupré
D’esquif ancré ; – pour la carte appelant au pré
L’insulteur, le mural rectangle mortuaire,
Marbre blanc à nom noir ; – lorsque en plein sanctuaire
Bruit l’élévation, pour celle d’un laïc
L’hostie en jeu ; – quand loin des problèmes à hic,
Son temps fait, il végète, un rogaton de craie,
Pour un sain comprimé ; – pour la gemme qui raie
Le carreau vierge auquel s’attaque un vitrier,
Le Sancy ; – l’instrument qu’en rêve un meurtrier
Voit prêt à raccourcir, pour un coupe-cigares ;
– Signe au quadruple aspect, la croix qui, dans les gares,
Sur les disques tournants trône, œuvre de leurs rails,
Pour un dièse ; – au cirque, un groupe à hauts poitrails
D’altiers chevaux longtemps cabrés, pour une horde
D’hippocampes sans but ; – son vol pris, pour la corde
D’un gibet prêt, quand joue avec elle un grand vent,
Un lasso ; – dans le cas, équivoque souvent,
Où ses aiguilles font diamètre, une montre,
Pour un cadran à pouls ; – pour le gant à rencontre
Volant vers un quidam, celui qui drogue en l’air
Gomme enseigne ; – le croc, par la grue au but clair
Vers un fleuve abaissé, pour un fer sans amorce
D’écervelé pêcheur ; – l’annexe qui, de force
Mise à son chevalet, rend sourd un violon,
Pour une petite m ; – dans un parc de colon,
Quelque intrus caïman proche un parasol fixe,
Pour un lézard contre un cèpe ; – au cours d’une rixe,
Un brun chicot craché, pour un pépin de grain
D’un coup de langue exclu ; – pour le goinfre à refrain
Qu’à force d’applaudir on prend, le cousin braque
Qui fonce en plein plafond ; – dans un tir de baraque,
Pour une épingle à perle infidèle à son nœud,
Le jet d’eau qu’orne un œuf ; – lorsqu’un faubourg s’émeut
Où passe un régiment, pour un jonc chic, à pomme,
La canne en l’air sautant ; – pour l’échelle où s’assomme
La rainette à bocal, celle dont sans périr
Use un scaphandre ; – pour un cachet à guérir,
Une paire à mets chaud d’assiettes attractives
Formant bloc bords à bords ; – quand, bras nus, mains actives,
Trime un faiseur de tours, son jeu subtil d’anneaux,
Pour un stock neuf de ronds à clés ; – roi des tonneaux,
Le joyau d’Heidelberg, pour une tirelire ;
– Pour le cachet qui tape, y mettant de quoi lire,
Des lacs de cire à lettre, une hie au travail ;
– Pour le trou qu’un poussin fait quand finit son bail,
Celui que laisse au disque en papier l’écuyère ;
– Chez un sculpteur, pour un Poucet par la bruyère
Semant droit ses cailloux, un sauf Deucalion
Jetant ses pierres ; – quand, touché, grince un lion,
Le fusil du chasseur, pour un revolver juste
Criblant un brun caniche enragé ; – pour un buste
Au socle absent, ce qu’un sable ensevelisseur
A nu laissa du Sphinx ; – le jour du blanchisseur,
Un drap qu’ont de leur pourpre enrichi des menstrues,
Pour un mouchoir à sang nasal ; – aux coins des rues,
La plaque bleue à nom pur, pour celle où se lit
Le chiffre de maison ; – pour celle où suinte au lit
Un bouquet de cheveux, la papillote grasse
A côtelette ; – pour l’ex-bascule à disgrâce
D’un prometteur piégé à rats, un loyal tremplin ;
– Un tunnel, quand, vorace, il est de vapeur plein,
Pour un triste auditif conduit à tampon d’ouate ;
– Pour un dé, gaine-annexe au tiers doigt adéquate,
Lorsqu’il pose à l’envers, le gobelet à tours ;
– Pour celui des croupiers, si pur soit-il toujours
De rouge caoutchouc, le sourd racloir à boue ;
– Le jeu qui semble au chien fait pour qu’on le rabroue,
Pour un groupe au rancart, par les noirs pris aux blancs,
D’obscurs pions d’échecs ; – quand, de l’eau plein ses flancs,
Presque enfonce un canot, ce qui part des écopes,
Pour d’humains postillons ; – un toit pour télescopes,
Pour l’un, de l’autre veuf, des hémisphères forts
De Magdebourg ; – l’enfant, fruit d’occultes rapports,
Sur tel voyant rond-point mis, pour l’émergeant hôte
D’une galette à faire un roi ; – quand côte à côte
S’emballent deux chevaux, leur timon enchaîné,
Pour une flèche au vol bas ; – pour un dégainé.
Cuir à rasoir, la carte à commander qu’encadré
Un rectangle à poignée ; – un brûle-bout de ladre,
Pour un plat clou-punaise en solitaire exil
La pointe en l’air ; – en Suisse, au bazar, pour un cil,
Courbe évadé d’un œil doux, une corne noire
De chamois ; – à son clou mise, une bassinoire,
Pour un balancier mort, à revivre appelé ;
– Dans un char à bras en état d’être attelé,
L’avilissant harnais d’homme, pour des bretelles ;
– Chez l’impure, un suave oreiller à dentelles,
Pour la pelote où rit, de trous vierge, un volant ;
– Posé par l’escrimeur las, un masque isolant,
Pour un protège-orbite à remettre aux lunettes
D’un casseur de cailloux ; – la tempe aux rides nettes
D’un vieux, pour le revers supérieur d’un poing ;
– Pour le décoiffant drap noir d’un metteur au point,
Celui dont, faisant du vent, à quatre on recouvre
Un cercueil ; – l’album à gens, s’il faut pour qu’il s’ouvre
Vaincre un ou deux fermoirs, pour un paroissien ;
– Pour un tire-bouton vil, le croc quasi sien
Qui, sort noble, aux cinq doigts chez le manchot supplée ;
– L’écharpe à mettre un bras, pour celle où décuplée,
S’est cloîtrée une joue un jour de fluxion ;
– Lorsqu’il rend le fer chaud mûr pour la flexion,
Pour un excitateur d’âtre, un soufflet de forge ;
– Pour ce qu’un tousseur montre au docteur pour la gorge,
Un cavernaire arceau, par le couchant rougi,
A stalactite unique ; – un lac de sang surgi
Dans un quartier suspect, pour le crachat perfide
D’un phtisique ; – chez un sellier, l’attache où, vide,
Miroite un étrier, pour un feu ceinturon
D’ombrelle jaune ; – pour le grain traître à juron
Qu’un mangeur de gibier, de côté, crache au diable,
Un boulet fendant l’air ; – lorsque irrémédiable
L’inondation s’y frotte, un carton à tir,
Pour le domino « double as » ; – le voyant partir,
Pour un bouchon sauteur qu’on lâche, un cylindrique
Ascenseur ; – pour le dard frêle où le nord s’indique,
Une ligne d’absent qui flotte et coupe en deux
Un bassin ; – sentinelle au poste hasardeux,
Au tir, sur son fond blanc, pour une ombre chinoise,
La silhouette noire ; – une paire sournoise
De bolas, droit au but volant câble tendu,
Pour un haltère ; – quand l’escrimeur s’est fendu,
Pour une serpe, son fleuret fier d’être courbe ;
– Pour la gueule, au tonneau, gobant, sans nulle fourbe,
Un palet bien lancé, celle où choit du corbeau
Le fromage ; – le pli chargé dont tout est beau,
Lorsqu’il pose, excentrique, adresse contre table,
Pour un cinq rouge ; – pour le trident intraitable
Qui monte l’huître au bec, celui qui, du dehors,
Hisse au grenier le foin ; – quand devant deux décors
Qu’un mur sépare il tombe, un sec rideau de nues,
Pour un voile abaissé sur un nez fin ; – quand, nues,
Elles se croisent, pour des ciseaux trop ouverts,
Deux lames libres ; – quand sont clos ses volets verts,
Un blanc bloc de maisons dans une rue en pente,
Pour du roquefort ; – un gazon courbe où serpente
Un tuyau d’eau, pour une épaule d’immortel
Où rampe un cheveu long ; – pour un couloir d’hôtel
A numéros de clés lourds, un boulevard riche,
Plein d’enseignes à tige ; – aveugle ému qui triche,
Pour l’enfant qu’un bandeau sangle au colin-maillard,
Un mûr parlementaire ; – aux halles, quand, gaillard,
Il rôde à son abri, pour celui du saint-père,
Le blanc chapeau d’un fort ; – un fauve sein prospère
De nourrice en vert clair, pour un marron qui point,
Fendant son contenant ; – lorsque à brûle-pourpoint
Il se retourne, pour une coupe trop pleine,
Un rouge parapluie ; – assidue à la peine,
Pour celle qu’un chanceux fait trimer au tonneau,
La roue à bain froid d’un moulin ; – un blanc panneau
Qu’un porte-riflards plein pare, asile à cinq places,
Pour du neuf papier à chant ; – pour l’une des glaces
Qui, des dents, servent, monstre, au dentiste un reflet,
Un miroir concave à barbe ; – pour le sifflet
Qu’est la bouche aux index livrée, un jeu de grâces
Avant l’envol du rond ; – pour l’os aux branches grasses
Qu’un jour faste à poulet, pour rire, à deux l’on rompt,
Un éperon poudreux ; – pour deux pleurs au vol prompt,
Ce qu’expulsé un grippé d’espèce mal apprise
Qui dans ses doigts se mouche ; – un jour exempt de brise,
Pour un vide encrier, qu’on repaît d’encre, un seau .
Qui d’asphalte s’emplit ; – lorsqu’il fait d’un vaisseau
Signe, armé de rouge, un bras, pour une allumette
Dure à tuer ; – pour ceux qu’avant qu’on le remette
Montre un bouchon, des mots gravés dans un tronçon
D’arbre scié ; – quand du coude seul, sans façon,
Contre un mur il s’appuie, un bras nu de poseuse,
Pour un index frappeur ; – lorsqu’une mère, oseuse,
Ouvre un berceau, les blancs rideaux, pour deux feuillets
Non coupés qu’on disjoint ; – zigzaguant sans œillets,
Un pliant mètre jaune en passe de s’étendre,
Pour un lacet d’été mis ; – quand pour plus l’entendre
Du va-et-vient l’enfant use, un cerceau sonneur,
Pour un cœur de montre ; – en plein escalier d’honneur,
Une barre à tapis, pour la charnière en cuivre
D’un coffret se vidant ; – pour le signe apte à suivre
Plaît-il,ce qu’un carlin noir, en marchant devant,
Montre à son maître ; – pour ce qu’en y prélevant
Le dedans la cuiller ôte à l’œuf à la coque,
La calotte du pape ; – un beau toit de bicoque
Neigeux, pour un bouquin docte étalé dos haut,
Frais vêtu d’écolier papier ; – quand, comme il faut,
Fait un cheval au vert, le produit, pour des boules
De cochonnet en plein billard ; – pour ce qu’aux poules
Rafle au passage l’œuf, les éclaboussements
D’un mollet à bas blanc ; – d’angoissants ossements
Dans un bassin vidé, pour la part qu’a l’assiette
D’un suceur d’abatis ; – pour deux dents qu’une miette
Disjoint, les deux doigts blancs d’un valet qui, gants mis,
Pouce oisif, ramasse un croûton ; – lorsqu’en amis
Flânent deux noirs, leurs bras crochus, pour deux stupides
Hameçons emmêlés ; – pour l’aiguille aux rapides
Parcours qu’enchanté d’elle un tailleur meut du pied,
Un marteau-pilon ; – lorsqu’un jour à frac s’assied
Un soigneux, ses pans qu’il ouvre, pour une paire
De faux favoris au repos ; – pour un repaire
De dogue, adossé contre une clôture en fer,
Une guérite à grille ; – un tison plein d’enfer
Dans une pince à feu, pour le rubis qu’exhibé
Celle d’un lapidaire ; – un rond-de-cuir de scribe,
Pour celui qu’a pour nimbe un garçon pâtissier ;
– Pour la poché à l’envers qui lorsque entre l’huissier
Sort d’un pantalon lâche, un plat sac à pitance
Pour museau de cheval ; – pour deux dés en partance
Dans leur cornet, deux blancs cubes pris, de concert
Sucrant un gobelet vide ; – géant qui sert
D’enseigne, pour celui qu’on fixe aux maisons dignes,
Un impur numéro ; – pour celui dont les lignes
Fraîches à leurs secrets initient le buvard,
Un cylindre à parc ; – pour un petit doigt bavard
Visant une enquêteuse oreille, un index raide
Qu’une narine attire à soi ; – sobre offreur d’aide,
Un guide-âne, pour un échantillon rayé
De chemisier ; – quand, preste, un crédule effrayé
Fait les cornes, sa main, pour la tête attentive
D’un limaçon rôdeur ; pour la même inventive
Main en blanc gant de luxe, un asinal bonnet ;
– Quand s’est de l’oculiste ouvert le cabinet,
La pancarte au mur mise, en rang de lettres riche,
Pour un feuillet d’A B C ; – pour un fou qui triche,
Quand de son glissement de tour elle fait choix,
La reine ; – au sein d’un char funéraire, une croix
En violettes, pour une croix en poussière
D’améthystes à noir écrin ; – une brassière
De wagon, pour le bout culotté d’un vieux stick ;
– Pour les boulettes dont, à table, un gris loustic
Bombarde un bec d’ami, les sphères choquant, lourdes,
Un passe-boule ; – un mur à béquilles, à Lourdes,
Pour la page à l’envers d’un zélé tout petit
A grands A ; – le croûton par manque d’appétit
Laissé, quand la serviette y touche, non pliée,
Pour un doigt de gant à cordon blanc ; – oubliée,
Une alliance en plein coin clair de lavabo,
Pour l’O d’or d’un pli chic ; – cherchant l’absent bobo,
Pour un rouleau d’anglais taffetas, une pièce
D’enroulé satin ; – un ballon, pour l’espèce
De capsule à filet qu’on fait vaporiser ;
– Quand d’un bas on l’expulse, un œuf à repriser,
Pour ce qui d’une chèvre, avec retard, clôture
L’allégement ; – pour un reste à mésaventure
De muette mitaine, une flûte de Pan ;
– Pour l’oignon d’or qui fuit, taquinant son tympan,
D’un soupeur ivre à plat le gilet blanc, l’aphone
Bassinoire qu’on sort d’un lit ; – dès qu’il plafonne,
Un échappé ballon d’enfant dans un ciel beau,
Pour un rouge pâté d’huissier ; – un noir tableau
Qu’approprié un torchon, pour le front haut d’un nègre
Qui, s’épongeant, poisse un mouchoir ; pour une allègre
Mine de plomb, son doigt humide ornant d’un nom
Un embué carreau ; le même à dire « non »
Servant, horizontal, pour une pointe sombre
De boussole bougée ; – attiédi donneur d’ombre,
Quand sévit l’astre, pour un couvre-nuque, un mur
De tente à toit plat ; – pour un blanc cheveu de mûr
Blond, la sèche égayant un fouillis de havanes ;
– Pour deux anneaux serrant mal des doigts diaphanes
D’amaigri, ceux au cirque où deux bras ont plongé ;
– La feuille en plant où gît le compas en congé
D’un géomètre absent, pour une montre morte
Carrée ; – à s’étonner prêt si l’étape est forte,
Pour un campylomètre utilisé, l’avant
D’une brouette au pas ; – quand, d’un cheval savant,
La croupe a décrit son rond, pour une torsade,
Ses jambes de devant fixes ; – par temps maussade,
Quand la prolonge un V, l’aiguille à bons conseils,
Pour le bout d’un cheveu fourchu ; – pour deux orteils
Vus par un trou de bas, ce qu’encadre un malade
Fond de culotte ; – pour de la lourde salade
Parmentière, des blancs qu’en tas sur un damier
Met un bavard aux doigts distraits ; – pour le premier
Papier soyeux tombé d’une carte cornée,
Un gris dallage en verre uni ; – pour ce qu’ornée
De clous une semelle a dans la crotte empreint,
Un solitaire sans billes ; – lorsqu’il n’étreint
Rien, un saint brassard blanc, en montre, pour un brave
Nœud tout fait du soir ; – noire, une moustache à grave
Manque de nerf, si la mouche meuble son arc,
Pour un point d’orgue ; – quand brille à la pluie un parc,
L’intact fond d’un brisé pot de terre, pour une
Jaune paillette à trou ; – lorsqu’ils choient à la brune,
Pour des haricots verts sautant d’un plat, d’étroits
Feuillets de jalousie ; et tard, dans les endroits
Commerçants, d’entassés plis jaunes, pour des pommes
Qu’un fricoteur souffla mal ; – pour ces gais bonshommes
En papier qu’un plafond balance au bout d’un fil,
Les pendus après la neige ; – fruit d’un civil
Baiser, l’aqueux rond d’un gant blanc, pour une marque
D’égoutté chalumeau ; – pour celle qu’un monarque
A pour hochet, la main faite en marbre d’après
La dextre d’une belle ; – entiché du progrès,
Un Peau-Rouge en complet, pour un môme à rougeole ;
– Vu ses rayures, pour une prise rigole
A glissade de choix, un usagé chemin
A lancer les vaisseaux ; – pour un bec sans carmin
D’anémique au lit qui fume, un poing à bougie ;
– Quand queute un effronté, sa bille non rougie,
Pour une perle ronde à tige d’or pâli
Qu’on sort d’un ruban vert ; – l’appendice poli
D’un chien gris, pour l’antenne à bruit d’un métronome ;
– Pour l’interne rectangle où le tailleur nous nomme,
La suscription mise, une enveloppe aux durs
Flancs de toile ; – rageuse injuste à coups futurs,
La mailloche, au concert, pour un bout débonnaire
D’appui-main ; – pour la fente à rond d’un ordinaire
Protège-mine ; un vide asile à boutons lourds ;
– Pour deux sabots à chocs réchauffants d’orteils gourds,
Deux sauteurs bateaux à l’ancre en temps d’équinoxe
Se heurtant face à face ; – un jour sans match de boxe,
Un ballon de cuir qui part, pour un ganté poing
Offensif ; – un talon correct dont, récent point
De mire, un chanceux dix de pique est la retourne,
Pour un double-cinq ; – pour le poil gris qui séjourne
Dans l’épileuse pince exploratrice, un fil
De fer dont s’est rendu maître un étau viril ;
– Pour une humble chapelle où la tête se cogne,
La cathédrale monstre assise en plein Cologne ;
– Le brutal iceberg, du pôle nord natif,
Pour l’étroit bloc de glace asservi, portatif,
Qu’en morceaux pour le verre, à l’office, on brésille ;
– Chez un pêcheur, pour un pou dans une résille,
Une oisive araignée explorant un chalut ;
)))),
Cherche un coup d’encensoir à joindre à son salut :
Pour qu’à lui vienne la fortune, dont la roue
((((Témoin : – le gros banquier qu’on file et qu’on écroue ;
– Le grinche en paix, la nuit, jouant du rossignol ;
– Le Commissaire alors que le rosse Guignol ;
– Samson faible allant la dextre en avant ; – Turenne
Quand, de la bonne sorte, à Salzbach il étrenne ;
– L’absinthe à l’hypocondre ouvrant le paradis ;
– L’Enfant prodigue au nid rentrant sans un radis ;
– L’héritier plein de plans qui, près du catafalque,
Tout bas additionne, arrondit et défalque ;
– L’amiral commençant de ronfler sans effroi
Puis de Germain d’Auxerre entendant le beffroi ;
– Cinna conspirateur, devenant sur son siège
L’ami d’Auguste après avoir flairé le piège ;
– Le soulier visité par le petit Jésus ;
– L’odalisque à qui fut jeté le tire-jus ;
– Le téméraire qui passe une pièce fausse ;
– Daniel sympathique aux lions dans la fosse ;
– L’œuf effacé qu’illustre à jamais rend Colomb
En lui persuadant de se tenir d’aplomb ;
– Lourdes en petit fou changeant un grand malade ;
– Le faux prince tâtant du panier à salade ;
– Quand, voyant dans son mur Gretchen, il porte un toast
Puis s’ôte en buvant dix lustres, le docteur Faust ;
– Le mal qui foudroie en plein bonheur les toupies ;
– L’inventeur riche à sec mis par ses utopies ;
– Le lac de cire obscur quand, bravant la cuisson,
Un résolu cachet lui flanque un écusson ;
– Le pion à destin qu’un changement de case
Fait dame ; – Prométhée aux fers sur le Caucase ;
– Le chat dorloté puis cuit de la mèr’ Michel ;
– L’enfant cossu volé par un romanichel ;
– Cendrillon finissant par devenir princesse ;
)))),
Mouvant ses ailerons, tourne sans paix ni cesse,
– Tel, devant son nombril, le chapeau d’un benêt, –
Tout hôte flatte, écoule – opine du bonnet
Même alors qu’on soutient : – que garder une somme
Jamais d’un savetier ne compromit le somme ;
– Qu’un nain qui vous vient dans la glace à l’abdomen
Vous paraîtrait géant placé sous un dolmen;
– Qu’il faut, quand c’est servi, de force attabler l’homme
Qui d’un ver solitaire à sa charge est le home ;
– Qu’amène est d’instinct la femme envers son mari
Plus que la vieille fille envers son canari ;
– Qu’outre-Manche à certains essuyages intimes,
En aveugle accomplis, jamais ne sert le Times;
– Qu’un phtisique à Paris, plus vite qu’à Menton,
Rien que par le calme et l’air double son menton ;
– Qu’en l’honneur de l’asperge, en mai, lorsqu’il urine,
Jamais gourmet repu n’enfle, œil clos, sa narine ;
– Qu’ignare en son bocal, la rainette, selon
Son seul caprice, adopte ou lâche un échelon ;
– Qu’une mouche accentue en y tirant sa coupe
L’attrait par le breuvage exercé dans la coupe ;
– Qu’il en coûte au frileux de relever son col
Quand le mercure gèle et fait place à l’alcool ;
– Que rien n’est, du pays, semblable à la bottine,
Où l’abeille en tout temps, d’après Mignon, butine ;
– Qu’un poltron recevrait sans secousse un cartel
Pourvu que de nul autre il ne vînt que de Tell ;
– Que le feu fît aux rois plus bas courber l’échiné
Qu’en stratège émérite alluma Rostopchine ;
– Qu’un libéré bouchon, mieux qu’un bas, lorsqu’il part,
Traverserait un haut plafond de part en part ;
– Que, des astres, plus ronde est la lune et plus crue
Sa clarté, plus la somme, autour d’elle, est accrue ;
– Qu’en l’art nul n’égala Napoléon Ier
D’éviter de manger son pain blanc le premier ;
– Qu’à nu mis les travers de la femme savante
Jamais n’ont de Molière égayé la servante ;
– Qu’unanime un refus s’oppose à qui, poli,
Demande aux gens licence avant d’ouvrir un pli ;
– Que si le spécimen noir rare est chez la perle
Plus que le blanc, de même il en va chez le merle ;
– Que lorsqu’on l’a servi bien le joueur de Nain
Jaune adore finir sans avoir eu la main ;
– Que c’est lors d’un de ses étés qu’ému d’une aune
De son manteau l’humain saint Martin fit l’aumône ;
– Qu’en amour nul ne sut faire à l’égal d’Onan
Passer avant tout la loi du donnant donnant ;
– Qu’est l’effet détruit moins bien que par un bécarre
D’une altération par la prochaine barre ;
– Qu’à sa voisine à sec, jadis, parla fourmi,
Tout fut, quand vint la bise, obligeamment fourni ;
– Qu’Attila, mieux campé que son aîné Rodrigue,
D’alexandrins fameux est plus que lui prodigue ;
– Qu’un trait courbe, à l’encontre allant d’un bruit qui court,
Pour marier deux points plus qu’une droite est court ;
– Qu’un houleux débat lorsqu’on sonne s’envenime ;
– Que l’arme l’a plus noble est la lettre anonyme
Pour battre ses rivaux dans la course aux honneurs
Que de prospérités, que de fermes bonheurs
Pour qui n’est point aveugle ont une source infâme !
Le pr ix de piano dépend plus pour la femme
Du nombre de galants qu’elle a dans le jury
Que de son déchiffrage et du talent mûri
Qu’elle déploie ou non en jouant sa sonate ;
Maint X...-lès-Bains doit moins à son bicarbonate
Qu’aux joueurs qui, la nuit, hantent son casino.
– Lettre que, révolté, le digne Calino
Sans la décacheter jetait dans la corbeille –
Ou que la loi salique existe chez l’abeille ;
)))
Deux couteaux cliquetants qu’affûté un découpeur ;
)),
Veste au dos, feutre au front, – objet si peu trompeur, –
Un brevet pour l’oiseau de foncière bêtise ;
),
Surtout gris, chapeau noir (dont l’aspect synthétise
Ces temps où l’on voyait des rois partis de rien
Et qu’inlassablement fouille l’historien ;
),
Mis par lui jusqu’au bout sur son rocher accore,
Ne magnifiaient pas sa silhouette encore,
Fait que, méditatif, on oublie un moment
L’Egypte, son soleil, ses soirs, son firmament.

III

La Colonne qui, léchée jusqu’à ce que la langue saigne, guérit la jaunisse.

Mosquée Abou’lma’atéh. – Environs de Damiette.

Traitement héroîque ! user avec la langue,
Sans en rien rengainer qu’elle ne soit exsangue,
Après mille autres fous, les flancs de ce pilier !
Mais vers quoi ne courir, à quoi ne se plier,
Fasciné par l’espoir, palpable ou chimérique
(Espoir ! roi des leviers ! tout oncle d’Amérique
((Ce pays jeune encore, inépuisé, béni,
– Si tard, de nos atlas, vierge il resta banni, –
Où l’on rafle plus d’or, vingt fois, qu’en l’ancien monde,
Soit que – l’appétissant a besoin de l’immonde –
Par cent mille kilos on fabrique un engrais
Pour ces champs infinis, où, gaillards, le nez frais
(((Un jour, d’un chien souffrant fait un chien hydrophobe ;
S’assurer que toujours ce liquide que gobe
Même le mieux appris entre les nouveau-nés
Sort de l’ami de l’homme et lui vernit le nez
N’est pas, prenons-y garde, acte moins nécessaire
Que : – lorsque l’ennemi se fend d’un émissaire,
Sur les yeux de l’intrus appliquer un bandeau ;
– Quand passe un roi, marquer autour de son landau
Chaque point cardinal par un mouchard cycliste ;
– Quand, chef de conjurés, des noms on fait la liste,
Tout ce qu’on a d’esprit le mettre à la chiffrer ;
– Pour que l’oiseau pillard hésite à s’empiffrer,
Meubler d’épouvantails les terres où l’on sème ;
– Vieux ((((pendant notre hiver notre tignasse essaime,
Tels les rayons plantés dans le soleil vernal
S’en vont quand il se change en soleil hivernal ;
)))),
S’imposer de fuir l’air ou de porter calotte ;
– Après avoir sombré de culotte en culotte,
Mettre en sûr viager l’argent sauvé du club ;
– Engager le verrou quand c’est l’heure du tub ;
– Avant de travailler sur une corde raide
S’armer d’un balancier ;
))), cent chiens prêtent leur aide
(((Besoin d’aide ! ô besoin sublime, universel !
Combien mettraient des jours, sans aide, à voir le sel
Dont sont sursaturés un mot, une anecdote!
Pour que le perroquet distinctement radote
Faut-il pas qu’un de nous lui coupe le filet ?
L’empereur, la main tiède au sortir du gilet,
Stimulait son génie en humant une prise ;
Le superstitieux dont le miroir se brise
Dans sa détresse invite à conjurer le sort
Deux de ses doigts qui, mus comme par un ressort,
Prennent, en se tendant, l’allure de deux cornes ;
L’argument – au pouvoir du geste il est des bornes –
Eclaire, d’un ballet, l’imbroglio naîf;
Grâce à l’ongle on peut voir les secrets d’un canif,
Sous un alinéa creuser un trait fragile ;
Le jus du raisin pris, exploratrice agile,
La langue, de partout, chasse pépins et peaux ;
)))
A cent bergers de qui dépendent cent troupeaux ;
Soit qu’on ouvre un hôtel dans l’air sain d’une cime
Chère aux débilités du monde richissime ;
Soit que par stocks on vende à l’agioteur snob
(((Le rôle du snobisme ((((au vrai qu’était Jacob
Même est-on sur que Dieu, quand il fit le snobisme
(Si l’animal ne sait pas plus percer un isthme
Que peser le soleil, asservir la vapeur,
Faire d’un ciel son but et ressentir la peur
D’un séjour encombré de flammes éternelles
Ou, s’il parle, sortir des phrases personnelles,
Entre un quidam et lui, pourtant, que de rapports !
Ne retrouvons-nous pas nos instincts chez les porcs ?
Chez les chiens sauveteurs qui foncent à la nage ?
),
Décréta que de l’homme il serait l’apanage?
Gageons que le mulot (monture de combat
Le cheval plus que l’âne est noble ; au lieu du bat,
C’est La mitraille, lui, qui, par devant, le blesse ;
Et tout dans son aspect signale sa noblesse,
Alors qu’on est moins sûr, dans le tas des humains,
De reconnaître au port, à la blancheur des mains,
L’individu qu’écrasé un nom à particule
Que : – l’instable ataxique à son pas ridicule
Qui fait sur son chemin s’emporter les roquets ;
– Le noyeur de soucis qui chez les mastroquets,
Coude léger, front lourd, à grands coups s’intoxique
A son souffle, à son pas ((comme notre ataxique )),
A la clarté de son horizontal jet fort ;
– Un génie immense à surnaturel apport
A l’historique affront qu’à son aube il essuie
Avant de faire école et de passer messie ;
– A son sang lorsqu’il crache, à ses mollets de coq
L’homme aux prises avec le bacille de Koch ;
– A sa bouche lippue où trempe un nez d’élite
Flanqué d’ yeux au bord rouge un pur israélite ;
– Au pli de son masque un penseur ; – au remuement
Par quoi le contredit son nez l’homme qui ment ;
– A leur sinistre anneau les victimes du maire ;
)
Souffre de ce qu’on ait mésallié : – sa mère
(En qui son double aspect, même s’il la surprend
((Quand, sous un soleil fier des points qu’au nôtre il rend,
En ces pays à sieste où l’on ignore l’âtre,
La femme a, blanche ou noire, un rejeton mulâtre,
Est-elle, s’il s’endort, moins prompte à parler bas,
Moins tremblante, plus tord, en surveillant ses pas,
Quand, rieur, il commence à trouver l’équilibre ?
)),
Ne paralyse pas cette sublime fibre
Qu’excita Salomon lors de son jugement
)
S’il eut pour premier gîte un ventre de jument ;
– Son père l’étalon si sa mère est ânesse.
Un franc snob que gonfla l’achat d’un droit d’aînesse
Qu’ Esaü pleura, snob lui-même, en digérant ;
))))
Fut, est et jusqu’au bout sera prépondérant ;
)))
Des tableaux dont il faut lui seriner l’école ;
Soit qu’on fonde un journal, soit qu’on lance une colle
Apte – dit l’étiquette – à forcer au besoin
(((Lire souvent égale être leurré, témoin :
– Les chèques faux, payés sans délais ni manières ;
– Ce que sert ((((sans avoir poussé plus loin qu’Asnières ))))
Sur les traits que les noirs trempent dans du poison,
L’anneau qui de leur nez traverse la cloison
Ou leurs déserts sans fin, si vides qu’à la lettre
On n’en tirerait pas un caillou bon à mettre
Contre les dents du fond d’un futur orateur,
Dans ses Impressions le faux explorateur,
Qui ((((faisant alterner l’aimable et le sévère
Comme il est ordonné dans un vers qu’on révère
)))),
Lorsqu’il place un hors-d’œuvre hydrologique ardu
Sur tel grand fleuve auprès duquel un drap tordu
Semblerait n’engendrer qu’une larme par terre
Et l’Europe n’avoir pour principale artère
((((Bien qu’il s’agisse là du Danube )))) qu’un ru,
Fait suivre, sans souffler, d’un renseignement cru
Sur les rapports qu’entre, eux ont l’amour et le lucre
Dans les lieux riverains civilisés ((((le sucre
Ote le goût laissé par un remède amer ;
))))
Le bouquet, à savoir qu’à ses bouches la mer
Est sur un champ immense exempte de salure ;
– Quand passe un faux aveugle à convaincante allure,
L’écriteau bref qui s’offre à l’œil apitoyé ;
– L’impur certificat du docteur soudoyé ;
– Le cadran du compas quand l’aiguille s’affole
Et l’étiquette, enfin, que porte une fiole . . .
Que de tristes produits, en effet, exaltés
Par l’inventeur ((((qui, dur, traite de saletés
Une chose, en son genre, est rarement unique
Comme, en le leur, jadis, le furent : – la tunique
Qu’eut, Déjanire aidant, Hercule après Nessus ;
– Chez les simples humains l’insigne processus
(Qui d’autre eut jamais l’heur de se sentir en vie
Après avoir, rigide, aux corbeaux fait envie ?
)
Du mal dont maints témoins virent Lazare atteint ;
– L’effet qu’eut du poisson sur un regard éteint
Quand, Raphaël présent, fut opéré Tobie ;
– L’effort que la nature, oubliant sa phobie,
Fit en laissant (jamais l’Écriture ne ment)
Un vide étroit couper en deux spontanément
La mer qui d’Israël rompait l’essor ; – la halte
Qu’un soir, au seuil de l’heure où sa splendeur exalte
Ceux qui par le génie ont le front bossué.
Le fougueux soleil fit pour servir Josué ;
L’or qu’eut certain bélier pour système pilaire.
Les composés rivaux d’espèce similaire
)))),
Bien que, passés ou frais, ils agissent non plus
Que : – sur la masse un nom de chantre aux vers peu lus ;
– L’haleine du soufflet quand tout est mort dans l’âtre ;
– Sur un membre de bois le plus actif emplâtre ;
– Sur le regard, quand l’œil est artificiel,
Un doigt de belladone ;
))) à menacer le ciel
(((Menace vaine, on sait que l’astre le plus proche
Loge encore trop haut pour que rien le décroche ;
)))
La moustache rebelle à quoi nul coup de fer
N’ôte la rage, hélas ! de menacer l’enfer ;
Soit qu’on prépare une eau – poison dont rien ne sauve
Le microbe sournois chargé de rendre chauve –
Capable d’affamer les vendeurs de cheveux ;
))
Avec le doigt et l’œil fait suivre à ses neveux
Sa stricte volonté, féconde ou saugrenue,
– Ses neveux trépignants, qui, dès qu’il éternue,
Joyeux, rêvent de crêpe et de flux lacrymal ;
),
De provoquer en soi la détente d’un mal.

IV

Les Jardins de Rosette vus d’une dahabieh.

Environs du Caire.

Rasant le Nil, je vois fuir deux rives couvertes
De fleurs, d’ailes, d’éclairs, de riches plantes vertes
Dont une suffirait à vingt de nos salons
(Doux salons où sitôt qu’ont tourné deux talons
((En se divertissant soit de sa couardise
(((Force particuliers, quoi qu’on leur fasse ou dise,
Jugeant le talion d’un emploi peu prudent,
Rendent salut pour œil et sourire pour dent ;
)))
Si – fait aux quolibets transparents, à la honte –
((( Se fait-on pas à tout ? deux jours après la tonte,
Le mouton aguerri ne ressent plus le frais ;
S’il peut rire, chanter, siffler, faire des frais,
C’est que le perroquet se fait vite a la chaîne
Qui – lui qui sait vieillir comme vieillit un chêne
Quand nul n’est au persil des mets où son bec mord –
Le rive à son perchoir et l’y rivera mort ;
L’envieux ((((dont les nuits cessaient de couler calmes
Au vu d’un nom ami dans la liste des palmes
Et chez qui se perdaient le boire et le manger
Quand, non moins célébré qu’en France à l’étranger,
Un confrère – à t’en croire une franche savate –
Voyait se transformer sa rosette en cravate
))))
Se fait au sentiment du montage d’autrui ;
L’astronome ((((tel astre apparaît aujourd’hui
Comme un feu dont l’éclat aux clignements nous force
Qui, lorsque l’eau couvrait, de la terrestre écorce,
Tout, sauf les pics par l’homme encore non atteints,
S’était classé déjà dans les mondes éteints . . .
– Tout feu s’éteint, en nous comme dans la nature ;
Sur les plis qu’on n’obtient que contre signature
D’un souffle l’envoyeur éteint chaque cachet ;
L’âge éteint certains feux : jamais las, le cochet
Prend tout, poulette, poule à point, poule douairière . . .
Le coq mûr fait un choix ; les poltrons, au derrière,
Ont un feu qui s’abstient de survivre au danger
(((((Feu cuisant, mais fictif ; jamais, à vidanger,
Nul ne fut intrigué par sa cendre, et le lièvre
Ne le vit pas brusquer les grenouilles ;
))))) ; la fièvre
Crée un feu qui s’éteint, soit quand le sujet meurt,
Soit quand, grandi parfois à menacer d’un heurt,
Lustres, vos cristaux bas et vos basses ampoules,
Tout progresse ; au moment où, rendant pour les poules,
Ces sages couche-tôt, le premier somme urgent,
Le soleil plonge à l’ouest, même riche (l’argent
Fait avec lui, de front, marcher le privilège ;
Le cancre chic est sûr d’éclipser au collège
((Aux dessus du prochain on reconnaît son rang
Comme : – sa provenance au son suspect ou franc
Qu’émet une monnaie en sautant sur un marbre ;
– A sa striation l’Age d’un tronçon d’arbre ;
– A sa denture l’an où naquit un coursier ;
))
L’aigle dont, à l’envi, les coudes de boursier
D’un proche percement font luire la promesse ;
Au suicidé riche on accorde une messe :
Il est dur de partir sans un De profondis ;
),
On portait l’allumette à la mèche jadis,
Geste qu’a fait vieillir l’éclairage électrique ;
Le moteur, provoquant la baisse sur la trique,
A mis en discrédit le tirage animal,
– Et depuis les moineaux, pour vivre, ont plus de mal ;
Que sont près des canons les gauches catapultes ?
– La fièvre nous fait croître, on le sait, même adultes,
Par degrés il se change en frais convalescent
Poussé par la fringale à manger comme cent
Et porteur d’une langue à nouveau bien rougie ;
Le feu qui, patient, fait fondre une bougie
S’éteint : – tandis que choit le marteau lorsqu’on vend
Un immeuble à l’encan ; – sous un assaut de vent,
Quand, aux flambeaux, l’on sort un roi d’une demeure,
Pompe que l’héritier, qui paierait pour qu’il meure,
Que de choses se font attendre, hélas !
depuis Le plongeon du caillou qu’on lâche dans un puits,
Les hommages publics, – sommité disparue
Seule est en droit d’avoir sa statue et sa rue, –
La fin quand dans l’eau froide un bloc de sucre fond,
Pour l’homme sans sommeil ces blancheurs, au plafond,
Par quoi sont annoncés l’aurore et son spectacle,
Dans tout feuilleton sain la chute de l’obstacle
Qui du parfait bonheur sépare le héros,
L’épouseur quand le sac n’est pas réputé gros,
Le revers de costume à ruban écarlate
Jusqu’au tonnerre, alors que, sourd, le coup n’éclate
Qu’une minute après qu’un faible éclair a lui !
Grille en secret de voir se déployer pour lui ;
Nul n’est sans caresser un ambitieux rêve ;
L’ouvrier croit se voir dictant, lors d’une grève
(Aujourd’hui l’on raisonne et chacun, l’œil au but
((Tous nous on avons un ; tant que son occiput,
Mis nu dans l’intérêt du for de la machine,
Tient pour plus d’un quart d’heure encore à son échine,
Songeant : « Perdre sa proie arrive – et c’est fréquent –
A qui la tient le mieux » (((au fait, l’inconséquent
S’enfuit du cabanon, le reclus de la geôle,
Le fromage du bec du corbeau qu’on enjôle ;
– De se taire, parfois, riche est l’occasion ;
))),
L’assassin a lui-même un but : l’évasion ;
)),
Que son idéal soit : toucher un gros salaire,
Enfanter, voir son grain surabonder sur l’aire
Ou contraindre son pouls à choir, à s’assagir,
Sent que, pour triompher, mieux vaut penser, agir
Que faire – tâcheron, épousée inféconde,
Moissonneur ou malade – un vœu dans la seconde
Où l’étoile filante élonge sa lueur ;
),
Las de donner à boire au bourgeois sa sueur
(C’est pour Pierre, souvent, que Paul souffre et travaille ;
Vespuce, de Colomb, exploita la trouvaille ;
Et c’est pour emperler tel doigt ou tel plastron
Qu’une huître est tout labeur ;
), des lois à son patron ;
La garce en son grenier pense à rouler carrosse ;
Se voir pousser aux mains l’améthyste et la crosse
Est une fiction chère à tout prestolet.
– Quand, brutal, au sortir d’un lointain pistolet
Qu’étreint un champion dont tous les coups font mouche,
Un projectile heureux rompt la mèche ou la mouche ; –
Quand un liseur, au lit (((((dos hors de l’oreiller,
Front en main, tant il sent l’intérêt s’éveiller
))))),
Dévore justement quelque poignant passage
Où, mère sans anneau (((((que l’univers croit sage
Tant son accouchement sut être clandestin
)))))
Dont (((((prêt à joindre au sien son plantureux destin)))))
S’est épris pour la vie un banquier de la haute,
Une jeune employée, un an après la faute,
Combien change de force un mot suivant les cas !
Eclair dit « feu du ciel escorté de fracas »
Ou « reflet qu’un canif fait jaillir de sa lame » ;
Corbeille qui, trouvé dans un épithalame,
Offre aux yeux de l’esprit l’empire du joyau
Rend ailleurs « dépotoir à vieux papiers » ; noyau
Ici sort pour « comète » et sert là pour « cerise » ;
A révolution peut correspondre « crise
Où du prince obéi le peuple dit : Je veux »
Ou « court ébranlement d’un système nerveux » ;
De « fauteuil » saute à « mer » bras ; de « tome » à « roi » suite ;
De « façon dont croupit l’homme » à « tuyau » conduite ;
De « grinçant cube on craie » à « civilisé » blanc ;
D’ « écueil traître où la mort plane » à « siège ingrat » banc ;
« Manger louche » ou « support chic » de champignon use ;
« Ce dont s’arme un gêneur à marteau qu’on excuse »
Ou « numéro suant le prestige » est dans clou ;
« Ce qui, le décrassage aidant, rend le bain flou »
Dans savon ou « ce qu’un chauffé sous-ordre écoute » ;
« Affliction qu’hostile au somme un péché coûte »
Ou « mèche à chatouiller le cou » dans repentir ;
« Trait par quoi dès l’enfance on s’exerce à mentir »
Dans bâton ou « suprême attribut militaire » ;
« Emplumé rôtisseur d’humains propriétaire
D’un arc » dans naturel ou « simple heureux défaut
D’apprêt » ; dans paradis « puant cintre » ou « Là-haut,
Bien habité séjour fleuri rendant les justes
Choristes » ; « timbale à tralala pour robustes
Gasters » ou « pleur de plume incongru » dans pâté ;
« Scientifique choix d’aliments à gâté
Plaisir » dans régime ou « façon dont on se laisse
Par la clique au pouvoir tondre et mener en laisse » ;
« Cri par quoi, l’un soufflant l’autre, un alter ego
Vous raille » ou « paragraphe influent » dans écho ;
Faute enfin peint l’écart qui fait qu’est avec tache
Celle qu’on ne voit plus ou l’impair qu’un potache
A tel endroit précis commit dans son devoir ;
Or, décidera-t-on, lui, de ne plus le voir
Parce qu’un barbarisme est éclos dans son thème ?
Apprête son enfant pour un furtif baptême
Qui n’alourdira pas, hélas ! un seul drageoir,
Si, pour rire, quelqu’un planta dans le bougeoir
Une bougie-attrape invisiblement faite
Pour ne pouvoir brûler plus avant que son faîte ;
Tour que valent ceux-ci, quant à l’attrait du neuf :
Faire indûment couver par une poule un œuf
Dont l’autour avéré n’est autre qu’une cane,
Pour voir trembler la poule (autour de qui cancane,
Cherchant à quel canard elle fît trop la cour,
Bas, le bec demi-clos, toute la basse-cour
)
Dès que le caneton s’humecte la cheville ;
Cultiver la terreur chez une vieille fille
(Une au cœur faible en qui le goût du célibat
Fut formé par la peur du mari saoul qui bat
Ou l’exemple fameux du veuf à barbe bleue
)
En affublant son chat d’un brandon à la queue
Propre à le faire fuir vers elle éperdument.
– Lorsque part dans son sens un brusque éternuement
Suivi de vœux faits haut pour voir par Dieu bénie
La personne au nez pris ; le saint feu du génie
(((((Qui rend l’élu touché par lui si vaniteux
Qu’il trouve au firmament les vrais astres piteux
Auprès de l’astre neuf qui sur son front rayonne
Et songe à devenir le maître que crayonne
Quiconque a pour métier l’art caricatural,
– Art né, dit-on, un soir, du fou profil mural
Qu’offrait à des rieurs l’ombre d’une personne, –
A la porte duquel maint journaliste sonne,
Qui sur vingt grands cordons existants en tient un,
Lui qui souvent, alors qu’il se couche, est à jeun
Non moins que le fidèle en qui descend l’hostie
Si le mérite humain exclut la modestie
Autant que le lundi l’ardeur des travailleurs
(On se fait aux loisirs ; l’âme et le cœur ailleurs,
Sombre est le lycéen quand il rentre en octobre ;
),
Que, chez le criminel, la démence l’opprobre,
Qu’un hiver peu neigeux la cherté du gros sel,
L’orgueil, pourtant, n’est pas un vice universel ;
Le paon mis on dehors, il respecte les bêtes :
)))))
S’éteint quand l’âge rend son détenteur gaga
(((((Feu qui, si grand que soit tel nom, tel pseudonyme,
Chez nul n’est reconnu de façon unanime ;
– L’homme n’a pas ainsi qu’un pantin au bazar
Son prix collé sur lui ;
))))) ; sur son mur Balthazar
Vit, en traits défiant le grattoir et la gomme,
Trois mots de feu briller . . . puis s’éteindre ; chez l’homme,
Le feu de l’œil s’éteint à l’âge où dent par dent
Et cheveu par cheveu, sans choc, sans accident,
L’hirondelle, malgré son flair pour les tempêtes ;
Le bélier, bien qu’il soit l’emblème d’un crachat
(Tout le monde a nommé la Toison d’Or) ; le chat,
Bien qu’il se reconnaisse à minuit sans chandelle,
Bien qu’il sache prédire – ainsi que l’hirondelle,
Mais sans tant de justesse et de publicité –
Par ce qu’émet son poil comme électricité
La colère d’un ciel qui feint la gentillesse,
Bien qu’à la vierge il fasse une douce vieillesse
Et puisse marcher en silence sans tapis ;
Le loup, bien qu’une louve ait eu d’illustres pis ;
Le bouc, bien qu’aux humains sa peau fournisse l’outre ;
Malgré les prix courants de la sienne, la loutre ;
Bien que son nom désigne un tissu, l’alpaga.
Par l’action du temps, sa tête se déleste ;
))))
Se fait aux profondeurs du grand vide céleste
Où la lumière court sans jamais le franchir;
L’aphone à son ardoise, ennuyeuse à blanchir ;
)))
Il ne sait aux gifleurs que tendre l’autre joue,
Soit de ses fins talents s’il triche lorsqu’il joue ;
))
Sur celui qui s’éloigne on fait courir maints bruits ;
),
D’opaque frondaison, de rayons et de fruits.